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Paul MARROT

TABLEAU DE RUE

Je vis, traînant sur le pavé,
Un cul-de-jatte lamentable ;
Il était haut comme une table,
Triste comme un tambour crevé,

À ses côtés, sa femme, maigre,
Demandait des sous aux passants,
En tirant des bruits languissants
Des boyaux d'un violon aigre.

L'estropié faisait pitié,
Son état, qui portait aux larmes,
Ajoutait je ne sais quels charmes
Au violon de sa moitié.

Race humaine, race ironique,
Pour secouer ton embonpoint,
La misère ne suffit point,
Il y faut un peu de musique.

Paul MARROT (Le Chat Noir, 29 avril 1882)